le Lundi 2 décembre 2024
le Lundi 29 janvier 2024 11:42 | mis à jour le 19 août 2024 20:43 Actualités

L’inquiétude s’installe également à l’Université de Hearst

L’inquiétude s’installe également à l’Université de Hearst
00:00 00:00

Une semaine après avoir annoncé la mise en oeuvre de plusieurs initiatives visant à favoriser l’épanouissement des communautés francophones en situation mino- ritaire en matière d’immigration, la deuxième annonce publique du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté a été moins bien accueillie. 

En effet, Marc Miller en a laissé plusieurs incrédules en début de semaine, lorsqu’il a annoncé une baisse de 35 % au niveau national du nombre de permis d’études octroyé aux étudiants internationaux. 

La déclaration inquiète les établissements postsecondaires, surtout en Ontario, bien que les détails ne soient pas encore connus. En effet, le pourcentage national est réparti parmi les provinces en fonction de leur population, ce qui signifie pour les collèges et les universités ontariennes une baisse de 50 % du nombre de permis d’études qui seront délivrés pour l’année 2024-2025. 

Luc Bussières, recteur de l’Université de Hearst (UdeH), comprend que le gouvernement devait apporter des correctifs pour certaines situations comme la fraude ou l’exploitation par des institutions qui ont fait des offres d’admission à des étudiants sans avoir de places pour eux dans leurs programmes. Ce qu’il déplore, c’est que les mesures viennent s’appliquer à l’ensemble des collèges et universités du Canada, que l’institution soit publique ou privée. 

« Pour le moment, ce que nous savons c’est que des mesures similaires seront prises pour 2025, mais sans précisions claires. De plus, le fédéral demande aux provinces de répartir les permis d’études dans leur province. Donc, nous n’avons aucune idée si le 50 % est réparti au prorata du nombre de permis d’études que nous avions dans la dernière année, ou selon une moyenne des dernières années. » 

Selon M. Bussières, certains ont suggéré que les institutions francophones ne soient pas soumises à cette mesure. Sachant que les étudiants qui s’y inscrivent en provenance de l’international contribuent à atteindre la cible d’immigration francophone hors Québec, un lot de questionnement s’est installé. 

Pour l’Université de Hearst, la réduction du nombre d’étudiants en provenance d’autres pays dès septembre 2024 aura des répercussions pendant les quatre prochaines années. « Si au lieu de recevoir 75 ou 100 étudiants internationaux nous allons en recevoir la moitié, le manque à gagner suivra la cohorte pendant trois ou quatre ans. C’est quand même un impact majeur ! » 

Le recteur de l’UdeH veut attendre avant de réagir puisqu’il y a beaucoup de tractations qui se font à l’échelle du pays, soit pour amener le gouvernement à changer d’idée ou à, au moins, donner des consignes aux provinces en ce qui concerne la répartition des permis d’études. « Certains établissements avaient jusqu’à 90 % de leurs détenteurs de permis d’études qui ne se présentaient tout simplement pas. Ça devenait comme une porte d’entrée pour venir travailler au Canada sans suivre un cours. La réputation du Canada s’était entachée un peu, mais en même temps, le Canada s’était fait une réputation très enviable d’accueillir des étudiants internationaux, comparable à la Grande-Bretagne et l’Australie. D’annoncer tardivement une telle mesure dans l’année et en demandant aux provinces de présenter un plan au plus tard le 31 mars quand des gens ont déjà fait des demandes pour septembre, ça nous laisse un peu dans l’inconnu. » 

De plus, le fédéral venait d’établir des critères plus sévères pour limiter le nombre de demandes en obligeant les étudiants à démontrer qu’ils avaient au moins 20 000 $ dans leur compte bancaire avant de leur donner un permis d’études. Cette hausse représente le double de ce qui était demandé auparavant. L’autre mesure importante ajoutée est la vérification avec les établissements de chaque dossier d’étudiant ayant fait une demande de permis d’études. Cette mesure empêche les fraudeurs de falsifier des documents d’offre d’admission pour obtenir un permis d’études au Canada sans avoir l’intention d’y étudier. « Avec ces nouvelles mesures, on aurait pu au moins attendre de voir quel effet ça allait avoir, avant de prendre d’autres mesures afin de corriger des bobos un peu partout sans savoir si ça va fonctionner », soutient M. Bussières. 

Dans le communiqué de presse du gouvernement, on dit vouloir améliorer l’accès au logement et aux soins de santé avec cette décision, puisque la tendance à recevoir des étudiants internationaux pour augmenter les revenus sans qu’ils bénéficient du soutien nécessaire pour réussir inquiète les gouvernements. « Nous n’avons pas eu le choix de changer notre façon de faire dans les dernières années, puisqu’il n’y a pas plus de logements de disponibles. Quand les étudiants internationaux ont notre offre d’admission en main, ils peuvent appliquer pour leur permis d’études. Lorsqu’ils l’ont reçu, nous leur permettons de s’inscrire à des cours et nous planifions avec eux leur arrivée. Mais nous leur demandons de payer une partie des frais de scolarité et de nous confirmer qu’ils ont un logement où aller, sinon nous ne leur permettons pas de s’inscrire et de s’en venir. Cette mesure est pour prévenir que nous n’ayons pas une cohorte avec des étudiants qui se retrouveraient sans abri », explique le recteur. 

Le sujet laisse planer encore beaucoup d’incertitudes et de questionnements chez les membres administratifs d’établissements postsecondaires partout au pays. Ce sont des mesures correctives qui arrivent tard et qui nécessitent des clarifications, selon eux. 

Photo : Archives Le Nord