1) Les ouragans de la discorde – Qui aurait cru que des ouragans pourraient faire l’objet de désinformation ? En septembre et octobre 2024, lorsque Helene et Milton ont frappé le sud-est des États-Unis, ils ont été accompagnés d’un déferlement de désinformation entourant autant les secouristes que la nature même d’un ouragan. Le fait que des millions d’Américains aient été capables de croire que les démocrates avaient pu créer ces deux ouragans pour nuire aux électeurs républicains, a démontré, si besoin était, que lorsqu’on parvient à créer chez un groupe un sentiment de détestation de l’autre groupe, on peut lui faire croire n’importe quoi.
2) Les algorithmes d’Elon Musk – À partir du 13 juillet 2024, certains messages politiques sur la plateforme X ont soudain vu leur portée quadrupler, ce qui suggérait un changement dans l’algorithme visant à favoriser des contenus favorables à un parti politique plutôt qu’à l’autre. Cette date correspond au moment où le propriétaire de X, Elon Musk, a annoncé qu’il endossait Donald Trump.
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3) L’influenceur Robert F. Kennedy – C’est en 2025 qu’on sera capable de mesurer l’influence qu’aura « RFK » sur la santé publique. Mais d’ores et déjà, les mouvements qui, depuis 15 à 20 ans, nient l’importance de la vaccination —comme le Children’s Health Defense que RFK a fondé— ont remporté une immense victoire : la désinformation sur les vaccins —et sur plusieurs autres enjeux de santé— va accéder, sous la deuxième présidence Trump, aux plus hauts échelons du pouvoir politique. Dans le pire des scénarios, il y aura dans les prochaines années une baisse progressive des taux de vaccination —parce que des parents inquiets face aux vaccins se sentiront confortés dans leurs craintes— et cette baisse entraînera une hausse progressive des éclosions de rougeole et autres maladies évitables.
4) Un rapport politique n’est pas une étude – Le 2 décembre, paraissaient à Washington deux rapports sur la COVID pondus par des politiciens: l’un, par les républicains et l’autre, par les démocrates. Si quelqu’un vous a dit qu’il y avait des « révélations », cela trahissait que cette personne n’avait lu que le rapport républicain, et qu’elle l’avait analysé comme si c’était une étude scientifique. Confier cette nouvelle à des journalistes scientifiques aurait évité des titres trompeurs.
5) L’IA, moins influente que prévu – Si la désinformation autour des élections des quatre coins du monde a été abondante en 2024, en revanche, l’IA n’a pas été autant à blâmer que ce qu’on aurait craint. Même dans l’élection présidentielle américaine, les faux contenus générés par l’IA ont été minoritaires et peu influents. La désinformation créée par de simples vraies photos ou vraies vidéos auxquelles on prête une signification qu’elles n’ont pas, a encore de beaux jours devant elle.
6) L’IA, moins fiable que prévu – Par contre, les ChatGPT de ce monde ont continué de prouver en 2024 qu’ils étaient incapables de distinguer le vrai du faux. De quelque façon qu’on les teste, ils persistent à donner des réponses fausses à des questions, même des questions simples —surtout des questions simples, selon une étude parue en septembre dans Nature.
7) Une loi contre les chemtrails. En avril, l’État du Tennessee a en effet voté une loi interdisant les chemtrails. C’est là qu’on est rendu.
8) La désinformation, c’est rentable. Quatre organismes connus pour leurs étalages de fausses informations pendant la pandémie ont récolté des revenus de plus de 118 millions$ US entre 2020 et 2022, dont le Children’s Health Defense de RFK.
9) Piste de solution: combattre les biais partisans. La difficulté à différencier un fait d’une opinion constitue une des causes premières de la dissémination de fausses nouvelles. Et si la marche reste aussi élevée, ont conclu cette année deux chercheurs de l’Université de l’Illinois, c’est parce que, parmi tous nos biais, ce serait le biais partisan qui aurait le plus gros impact. Autrement dit, notre définition d’un fait est grandement influencée par le parti politique pour lequel nous votons. Et ça peut aller très loin: en mars, une étude concluait qu’aux États-Unis, plus une région votait pour le parti républicain, plus les patients de cette région étaient enclins à prétendre avoir eu des effets secondaires à cause d’un des vaccins contre la COVID.
10) Autre piste de solution: combattre l’opacité des algorithmes. Cette année encore, les chercheurs qui ont été aux premières loges des études sur la désinformation ont pu constater que même les solutions les plus simples se heurtent à des obstacles politiques. Qu’il s’agisse des efforts pour imposer plus de transparence aux plateformes ou pour limiter la propagande haineuse, les mouvements qui bénéficient le plus des fausses nouvelles sont aux premières loges pour prétendre qu’il s’agit d’une atteinte à leur liberté d’expression. On n’avancera pas dans la bonne direction, concluait en juin un dossier spécial de la revue Nature, tant qu’on n’aura pas légiféré pour obliger les réseaux sociaux à être plus transparents —quant à ce qu’ils cachent dans leurs algorithmes et ce qui leur rapporte le plus de revenus publicitaires.
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