Le gouvernement ontarien a rejeté lundi le plan du député libéral Adil Shamji – un médecin – qui visait à interdire aux cliniques de santé de remettre des factures à leurs patients.
En Ontario, plusieurs cliniques de santé privées offrent les services d’infirmières praticiennes, comme des consultations sans rendez-vous, aux frais des patients.
Le Droit rapportait, il y a un an, que le gouvernement Ford avait entamé une enquête concernant l’une de ces cliniques, basée à Ottawa. Cette clinique est actuellement ouverte.
Elle offre des services d’infirmières praticiennes au coût de 400 $ par année, ce qui comprend une consultation initiale, et une facture de 75 $ par visite de suivi.
Règles différentes
Les médecins de famille n’ont pas le droit de charger les patients, puisqu’ils sont couverts par le régime d’assurance maladie de l’Ontario.
N’empêche, les règles régissant les infirmières praticiennes ne sont pas aussi claires, étant donné qu’elles ne sont pas couvertes par l’assurance maladie lorsqu’elles ne travaillent pas dans des cliniques financées par les fonds publics.
La Loi ne les empêche donc pas de remettre une facture aux patients, que ce soit un montant annuel ou un paiement pour les services individuels rendus.
Une base de données compilée par l’Association des infirmières praticiennes de l’Ontario indique que la province comptait plus de 30 de ces cliniques privées à la fin de l’année dernière.
À plusieurs reprises, la ministre de la Santé Sylvia Jones s’est dite en désaccord avec l’idée que des patients couverts par le régime d’assurance maladie de l’Ontario doivent payer pour recevoir des services de ces cliniques.
«Cette absence d’interdiction a créé une lacune dont certains prestataires de soins de santé et leurs cliniques profitent, sachant qu’il n’y a aucune conséquence juridique ni aucun risque de fermeture», avait-elle déploré, au printemps dernier.
Éliminer la zone grise
Le projet de loi du Dr Shamji, déposé jeudi dernier, visait à remédier à cette situation et à éliminer la zone grise actuelle, en interdisant aux infirmières praticiennes des cliniques privées d’accepter des paiements de la part d’Ontariens couverts par l’assurance-santé de la province.
Ainsi, les infirmières praticiennes auraient été incluses au régime d’assurance maladie de l’Ontario, comme les médecins.
Or, le gouvernement Ford se dit inquiet de voir des professionnels de la santé quitter la province si l’Ontario décide d’interdire cette pratique, mais que le reste du pays n’en fasse pas autant.
En avril, la ministre Jones a demandé au gouvernement fédéral d’apporter des modifications à la Loi canadienne sur la santé pour régler ce problème. Mais depuis, rien n’a changé.
Coalition ontarienne de la santé
«Nous avons toujours soutenu de tout cœur les infirmières praticiennes en tant que membres essentiels de l’équipe soignante et en tant que chefs de file des cliniques de soins primaires», a indiqué la directrice générale de la Coalition ontarienne de la santé, Natalie Mehra, la semaine dernière, en soutien au projet de loi du Dr Shamji.
«Cependant, notre soutien s’arrête lorsqu’elles facturent directement les patients pour les services de santé dont ils ont besoin», a-t-elle ajouté.
Lorsque le gouvernement libéral précédent a mis en place des cliniques dirigées par des infirmières praticiennes, elles étaient financées par des fonds publics, a souligné la Coalition.
«Elles n’étaient pas autorisées à facturer les patients pour les services de santé dont ils avaient besoin. La rupture récente avec les principes fondamentaux de l’assurance-maladie publique sous le gouvernement Ford est à la fois inutile et inacceptable», a noté l’organisme non partisan.
Pas la première tentative
La députée néo-démocrate France Gélinas avait déjà déposé un projet de loi à cet effet, en 2022, qui prévoyait notamment qu’un professionnel de la santé ayant facturé à un patient des «honoraires injustes» puisse être obligé de le rembourser et de voir son certificat suspendu.
Son projet de loi avait été rejeté par le gouvernement majoritaire de Doug Ford à sa deuxième lecture, comme celui du député Adil Shamji, lundi.