Alors que les gens nés au milieu du 19e siècle pouvaient espérer vivre entre 20 et 50 ans, ceux nés en 1990 pourraient apparemment viser entre 50 et 70 ans. Au moment où on avait fait cette estimation, plusieurs extrapolaient qu’on devrait s’attendre à voir une explosion des centenaires, voire des super-centenaires (110 ans et plus).
Or, une analyse parue le 7 octobre dans la revue Nature Aging remet, littéralement, les pendules à l’heure. Observant les données des décès de 1990 à 2019 dans les neuf pays où l’espérance de vie est la plus élevée, incluant la France et le Japon, en plus des États-Unis, les chercheurs concluent qu’en moyenne, l’espérance de vie à la naissance a augmenté de 6 ans et demi pendant cette période. Ce qui peut sembler beaucoup, mais montre un ralentissement par rapport aux 3 années par décennie de croissance du siècle précédent.
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Qui plus est, le ralentissement était plus prononcé pendant la période 2010-2019, particulièrement aux États-Unis.
En 2019, l’espérance de vie à la naissance aux États-Unis était de 78,8 ans. À Hong Kong, elle était de 85 ans. L’année 2019 a été choisie parce que la pandémie venait ensuite fausser les données.
Il est possible que dans le cas des États-Unis, la crise des opioïdes soit ce qui ait fait baisser la moyenne, mais si on se fie aux autres pays riches, la tendance serait néanmoins généralisée.
Si cette tendance devait se confirmer dans l’avenir, écrivent les chercheurs, l’espérance de vie moyenne pourrait atteindre un plateau d’environ 84 ans pour les hommes, et de 90 ans pour les femmes. Le nombre de centenaires serait donc moins élevé que ce que les plus optimistes prévoyaient il y a 30 ans.
Certains de ces mêmes chercheurs avaient publié une étude en 1990 où ils spéculaient déjà sur l’existence d’une limite biologique à l’espérance de vie. L’auteur principal, l’épidémiologiste de l’Université de l’Illinois Jan Olshansky, a même accepté en 2000 un pari avec le biologiste de l’Université de l’Alabama Steven Austad: celui-ci a misé à l’époque 150$ sur le fait que le premier humain à atteindre l’âge de 150 ans serait déjà né. Olshansky rejette l’idée. La somme a été déposée dans un fonds d’investissement et sera vraisemblablement remise à un des descendants des deux hommes, qui sont aujourd’hui septuagénaires.
On savait que les progrès rapides de la médecine dans le dernier siècle et demi étaient directement responsables de cette croissance. Mais l’inconnue était de nature biologique: y a-t-il une limite au vieillissement?
Pour l’instant, la plupart des chercheurs ne sont pas prêts à baisser les bras. Les investissements dans les médicaments et les traitements pour ralentir le vieillissement ont encore de beaux jours devant eux. Mais si cette tendance au ralentissement de la croissance devait se poursuivre pendant une ou deux autres décennies, l’expression « obsolescence programmée » prendra tôt ou tard un nouveau sens…