le Jeudi 12 décembre 2024

Lecours Lumber est aujourd’hui la plus grande scierie indépendante en Ontario. L’entreprise est un joueur important dans le domaine de l’industrie forestière dans la province et un employeur majeur pour la communauté de Hearst.

C’est en 1939 que démarre véritablement l’histoire de Lecours Lumber. Mon grand-père, Arthur Lecours, acquiert alors de la Couronne une concession de deux milles carrés dans le canton de Stoddart, à vingt-cinq kilomètres (15,5 milles) à l’ouest de Hearst. Il y construit, à Carey Lake, son premier moulin de bois de sciage, qui brule au début de juin 1942. Il en construit un nouveau au même endroit, la même année, et y ajoute une usine de rabotage. L’entreprise se nomme alors Arthur Lecours Co.

Se remettant difficilement du décès accidentel de son fils ainé, Adrien, survenu le 12 mars 1943 sur le chantier, Arthur quitte cet endroit qui lui rappelle trop de mauvais souvenirs. En aout 1943, il achète des droits de coupe à Calstock, de la compagnie Arrow Timber, alors propriété américaine. Il commence immédiatement à y faire chantier et construit, dès septembre, une scierie sur les rives du lac Constance. Il vend son moulin de Carey Lake à Ernest Gosselin. Calstock comprend aujourd’hui la réserve de la Première Nation du lac Constance, fondée en 1945 par le gouvernement fédéral. Alors qu’environ 820 personnes y vivent actuellement, personne n’y habitait à l’époque. Après l’établissement de la réserve, la scierie se retrouve désormais sur le territoire de la Première Nation. Une entente est donc signée entre la Couronne fédérale, au nom de la Première Nation du lac Constance, et Arthur Lecours Co., afin de permettre à l’entreprise de poursuivre ses activités.

Dès que ses fils atteignent l’âge de travailler ou terminent leurs études, Arthur les associe à la compagnie. Il change le nom pour A. Lecours and Sons Co. Ltd. François s’occupe surtout du bon fonctionnement de l’entreprise et Clément gère la compagnie avec son père. Au fil des ans, Maurice, Clément, Paul, François, Jules et Charles ont fait partie de A. Lecours and Sons, certains pour une durée plus courte que d’autres.

Arthur fait construire des camps pour loger les travailleurs et une cookerie où ils prennent leurs repas. À la fin des années 1940, une quinzaine d’hommes travaillent dix heures par jour, six jours par semaine. Ils gagnent en moyenne un dollar l’heure. Le samedi, à la fin de leur journée de travail, la plupart des hommes retournent dans leur famille à Hearst pour y passer 24 heures. Certains célibataires choisissent de rester au camp.

En 1951, Fred, le frère d’Arthur, construit un moulin non loin de l’entreprise de son frère. Cinq ans plus tard, il vend sa scierie à trois des fils d’Arthur : François, Paul et Jules. Ceux-ci fondent la compagnie F. P. and J. Lecours Co. Ltd., alors qu’A. Lecours and Sons reste aux mains d’Arthur et de son fils Clément. En 1960, par mesure d’efficacité, François, Paul et Jules déménagent leurs installations à côté de la scierie d’A. Lecours and Sons afin de scier le bois des deux entreprises. Ce bois est ensuite acheminé dans un wagon tiré par un cheval jusqu’au planeur d’A. Lecours and Sons. Comme ce planeur est désuet, F. P. and J. Lecours décide, en 1963, d’en faire construire un nouveau. Cette même année, Arthur vend ses parts à six de ses fils : François, Paul, Jules, Charles, Benoit et Laurent. Ceux-ci décident alors de fusionner les deux compagnies, qui deviennent Lecours Lumber Co. Ltd. Clément conserve le planeur que la compagnie utilise jusqu’à la construction d’une usine plus sophistiquée. En 1969, des installations modernes sont construites à la suite d’un incendie majeur qui a détruit une partie du moulin, le classeur manuel (slip) et l’ébouteuse (slasher).

De nombreux changements et bouleversements se produisent au sein de l’entreprise au cours des années qui suivent. Charles quitte l’entreprise en 1968 et achète de la Transcontinental des droits de coupe de neuf milles carrés, ce qui représente un canton (township). La même année, lui et Léon fondent la compagnie Deep Forest Products. Charles achète également de son frère Maurice les droits de coupe pour 5 000 cordes de bois à bucher dans le canton de Hanlan. Après quelques années, il transfère ces droits à United Sawmill, aujourd’hui GreenFirst Forest Products. En 1972, c’est au tour de François de partir. Il va, entre autres, travailler pour la compagnie Newaygo, à la construction d’une scierie à Mead, puis pour la Ville de Hearst dans la planification de l’aéroport municipal. Jules décède subitement d’une crise cardiaque en 1982 ; Laurent meurt tragiquement dans un accident d’hélicoptère en 1988, deux ans après s’être retiré de la compagnie. Paul meurt également en 1988, le 24 septembre, le même jour que son frère Clément. Rollande Marquis, veuve de Jules, et leurs enfants héritent des parts de Jules alors que les enfants de Paul reçoivent celles de leur père. En 2004, Benoit rachète toutes les parts pour devenir l’unique propriétaire de Lecours Lumber, en association avec ses enfants, Roger et Sylvette. En 2018, Sylvette vend la totalité de ses parts à son père et à son frère.

L’acquisition de droits de coupe auprès d’autres producteurs forestiers dans les années 1980 et 1990 permet à la compagnie de prendre de l’expansion. En 1982, elle achète la scierie Gosselin Lumber afin d’obtenir les droits de coupe que celle-ci détenait et maintient l’opération pendant encore six mois avant de la fermer définitivement. En 1992, après la fermeture de Levesque Lumber, elle obtient près de la moitié de ses droits de coupe.

Le 21 novembre 2015, le Hearst Forest Management, avec Lecours Lumber, organisait une soirée en l’honneur de Benoit afin de souligner sa contribution exceptionnelle dans le secteur forestier et dans le développement économique de la région. On voit ici Benoit, Simone et Charles lors de cette activité.

L’entreprise exploite de nos jours des installations de sciage et de rabotage à la fine pointe de la technologie. Au fil des ans, elle a toujours su faire face à la concurrence et se moderniser. Dans les années 1990, devant un marché difficile, elle considère divers produits spécialisés. Elle opte alors pour le bois classé par contrainte mécanique (MSR — machine stress-rated) et devient ainsi la première au Canada à produire cette qualité de bois en se servant de la technologie par rayons X (XLG- Xray Lumber Grader).

En 2012, les dirigeants de l’entreprise vivent des moments d’inquiétude et de grand stress. Ils songent sérieusement à mettre la clé sous la porte, car ils n’arrivent pas à une entente satisfaisante avec la Première Nation du lac Constance. En octobre, le démantèlement de la scierie est annoncé par le gérant, Jules Fournier. À la suite de pressions de toutes parts et à la demande de Lecours Lumber, le ministère des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada nomme finalement un médiateur. En février 2013, les deux parties parviennent à une entente, qui est signée au mois de juin suivant. Le bail, d’une durée de 40 ans, permet à Lecours Lumber de poursuivre ses activités sur le territoire de la Première Nation. Benoit se dit rassuré par cet accord, qui procure la paix d’esprit aux dirigeants actuels et futurs pour une relativement longue période. D’autres ententes parallèles entre la compagnie et la Première Nation offrent des garanties d’emploi aux Autochtones et traitent de questions environnementales.

Au cours des ans, l’entreprise a su apporter des changements majeurs afin de demeurer compétitive. Si ce n’était pas de la pénurie de main-d’oeuvre actuelle, elle pourrait produire plus de 100 millions de pieds de bois annuellement. Son bois d’oeuvre résineux est expédié par camion ou voie ferroviaire dans diverses provinces canadiennes et aux États-Unis. Elle emploie environ 150 travailleurs durant l’été et près de 210 l’hiver, selon la quantité de bois à couper. Environ 75 % de ceux qui travaillent à la scierie sont des Autochtones de la réserve de la Première Nation du lac Constance.

Lecours Lumber s’assure que ses employés accordent une importance primordiale au respect de l’environnement afin de protéger la faune et la flore. Elle croit aussi fortement au reboisement, car elle souhaite sincèrement que les générations futures puissent bénéficier de cette forêt boréale comme l’ont fait les générations avant elles.

Lecours Lumber a participé au développement de Hearst Forest Management Inc, un organisme privé qui regroupe d’autres compagnies forestières de Hearst et dont la mission est d’assurer une forêt saine dans la région. Benoit y a occupé divers postes pendant 30 ans, de 1986 à 2016. Il a pris sa retraite après plus de 60 ans de métier dans l’industrie forestière. Il en a vu l’évolution, allant de l’exploitation manuelle au fonctionnement informatisé.

Mon grand-père serait surement fier du développement de l’entreprise qu’il a fondée il y a 84 ans et du rôle important qu’elle joue au sein de la communauté de Hearst. Et moi, je suis fière d’être la petite-fille d’Arthur et de Stéphanie, des gens forts et courageux. Ils avaient quitté leur terre natale au Québec en 1927 pour venir s’établir en territoire isolé et inconnu, afin d’assurer un meilleur avenir à leurs enfants. Je crois qu’il serait juste de dire qu’ils ont réussi leur pari.

Le 9 octobre 1990, la Ville de Hearst a nommé un parc, le parc Lecours, en hommage aux trois frères Lecours, Arthur, Alfred et Georges, originaires de Sainte-Justine, qui se sont établis à Hearst dans les années 1920-1930 et qui ont contribué à l’essor de l’industrie forestière de la région. Ce parc, qui borde la rivière Mattawiskwia, se situe non loin de l’Hôpital Notre-Dame et du Foyer des Pionniers. Une plaque bilingue y relate ces faits.

 

Mes parents, Simone Lecours et Jules Camiré, se sont mariés le 14 juin 1943, alors que la Seconde Guerre mondiale battait son plein en Europe.

Ils s’étaient rencontrés à l’occasion d’une veillée mortuaire chez le frère de Jules, Émile, et son épouse, Florida, qui venaient de perdre leur fils Fernand, âgé de dix ans et demi. Il s’était noyé dans la rivière Mattawishkwia, derrière l’école Sainte-Thérèse, le 20 novembre 1941. À l’époque, il n’y avait pas de salon funéraire à Hearst, et le corps des défunts était exposé pendant deux ou trois jours dans la maison familiale. Il était de coutume de veiller le mort jour et nuit pour que son âme puisse quitter son enveloppe terrestre accompagnée de pensées positives et de prières des personnes qui lui étaient proches. Chaque heure, on récitait le chapelet. Comme la famille de mes grands-parents connaissait bien la famille Camiré et qu’Émile et Florida habitaient non loin de chez eux, plusieurs membres de la famille Lecours étaient allés témoigner leurs respects. Simone y avait passé une nuit avec sa soeur, Monique, et ses frères Paul et Clément. Mon père s’y trouvait ainsi que certains de ses frères et soeurs. Simone et Jules se connaissaient déjà, car ils se voyaient parfois à la messe et aux soirées de cartes que la paroisse organisait de temps à autre. Toutefois, c’était la première fois qu’ils passaient autant d’heures ensemble, ce qui leur a permis de mieux faire connaissance.

Peu de temps après, ils se sont revus lors d’une partie de cartes de la paroisse et Jules avait demandé à Simone s’il pouvait venir la voir chez elle. C’est ainsi que les fréquentations ont commencé. Ils ne se voyaient pas souvent, car pendant l’hiver, Jules faisait du charroyage pour la compagnie forestière Newaygo à Mead. Il venait en ville, par train, seulement une ou deux fois par mois. De chez lui, il marchait près de cinq milles pour aller voir sa « blonde ». Maman nous disait qu’ils ont rarement été seuls, puisqu’ils veillaient dans la cuisine ou dans la salle à manger ; il y avait toujours des enfants et, souvent, la maman.

Jules a fait sa grande demande au printemps 1942, pour un mariage prévu l’été suivant. Un accident tragique est cependant venu assombrir cet évènement qui aurait dû être heureux. En effet, le vendredi 12 mars 1943, Adrien, l’ainé de la famille Lecours, est décédé de façon tragique à l’âge de 22 ans, sur les chantiers de mon grand-père, à Carey Lake. Comme le mariage était déjà prévu depuis Noël, les fiancés ont quand même convenu d’aller de l’avant, avec l’approbation des parents. Alice, la soeur de Jules, et son fiancé, Raoul Vaillancourt, parlaient également de se marier en juin. Après en avoir discuté tous les quatre, ils ont opté pour un mariage double et ont choisi la date du 14 juin. Ils ont ensuite fait publier les bans.

La célébration s’est donc déroulée dans la sobriété. À cette époque, la période de deuil durait un an. Les adultes portaient du noir à la messe et à l’occasion d’autres sorties. L’habit chez l’homme, la robe chez la femme, les bas, les souliers, les chapeaux, les cravates, tout était noir. Les hommes qui n’avaient pas d’habit noir portaient un brassard noir pour indiquer qu’ils étaient en deuil. Après cette année de noir, le gris était de rigueur toute l’année suivante. Habituellement, il n’y avait pas, sinon peu, de célébrations durant la première année suivant un décès dans la famille.

La cérémonie a eu lieu à 8 h, le lundi 14 juin, dans la première église de Hearst, inaugurée en février 1920. Dans ces années, les mariages étaient célébrés tôt, habituellement avant 9 h, car les prêtres et ceux qui voulaient communier devaient être à jeun, c’est-à-dire qu’ils n’avaient ni mangé ni bu, pas même de l’eau, après minuit. Les mariages avaient lieu tous les jours de la semaine, sauf le dimanche. L’habitude de se marier le samedi est venue plus tard.

Un mariage double n’était pas inhabituel. Ça coutait moins cher aux familles, tant pour l’office religieux que pour le repas qui suivait. La grande majorité des familles avait peu de moyens ; de plus, comme nous étions en temps de guerre, plusieurs articles étaient rationnés, dont le sucre, le beurre et la viande.

Fait inusité : le voyage de noces s’était fait à cinq les deux premiers jours et à six les jours suivants ! Adrienne, 20 ans, soeur de Jules et d’Alice, avait accompagné les deux couples. Comme le budget était limité, Alice et Raoul l’avaient accueillie dans leur chambre, lors de leur première nuit de noces, dans une cabine sur le bord d’un lac à Kenogami. À Montréal, ils avaient rejoint le père de Jules et Léonce, un de ses frères, qui s’y étaient rendus par train. Les six, dont le père, avaient poursuivi leur voyage jusqu’à Saint-Narcisse-de-Beaurivage et la Beauce pour visiter des membres des familles Camiré et Vaillancourt qui y habitaient et où ils ont été logés. Autre temps, autres moeurs.

De gauche à droite : Léonce Camiré, Arthur Lecours, Odilon Camiré, Jules Camiré, Simone Lecours, Raoul Vaillancourt, Alice Camiré, Louis Camiré et Clodomir Vaillancourt

Ma mère, Simone Lecours Camiré, avait huit ans lorsqu’une grave crise économique, surnommée la Grande Dépression, a frappé le Canada et la majorité des pays industrialisés. La crise des années 1930, la pire que le monde ait connue, a créé un choc économique et social qui a laissé des millions de personnes sans emploi, sans abri et dans le besoin au pays. En 1933, 30 % de la population active étaient sans emploi et un Canadien sur cinq dépendait de l’aide gouvernementale.

La population de Hearst a été affectée. Les familles étaient pauvres et elles étaient nombreuses à nécessiter du secours direct, de l’aide gouvernementale, qu’on appelait relief. Dans son livre, Coloniser et Enseigner, Danielle Coulombe mentionne que : « En 1933, Mgr Hallé estime que plus de la moitié des gens de la région reçoivent du secours direct. » Hearst a d’ailleurs été la première ville au pays à recevoir cette aide. La décision fut prise par le gouvernement provincial à la suite d’une manifestation d’une cinquantaine d’hommes révoltés devant le magasin général West & Co. Ils exigeaient de la nourriture pour nourrir leur famille et étaient déterminés à s’en procurer de force s’il le fallait. M. Harvey West, qui était également maire de Hearst, appuyé par l’évêque et le médecin, a alors fait parvenir un télégramme à Queen’s Park. La réponse fut immédiate : un chèque de 600 $ fut acheminé ; l’argent devait être distribué parmi les plus démunis. Cet incident a lancé un programme d’aide à l’échelle de la province.

Afin d’aider les personnes inaptes à subvenir à leurs besoins, les gouvernements fédéral et provincial adoptèrent des mesures. Un soutien fut d’abord accordé sous forme de coupons échangeables dans des commerces désignés. Les coupons étaient envoyés par la poste ; la quantité était proportionnelle au nombre de personnes dans la maisonnée. Plus tard, les coupons ont été remplacés par des chèques échangeables dans les commerces.

Des salaires furent versés à des hommes pour creuser des fossés et défricher des terrains pour la construction de chemins. C’est ainsi qu’on prolongea la route 11, la Transcontinentale, à l’ouest de Hearst. Cependant, certaines routes construites au cours de cette période n’ont jamais servi…

Mes grands-parents, Arthur Lecours et Stéphanie Pouliot, ont également ressenti les contrecoups de cette récession. Ma mère disait toutefois se souvenir de n’avoir manqué de rien. Par ailleurs, elle disait qu’il fallait faire attention aux dépenses. Ses parents n’avaient aucun superflu, mais ils étaient conscients que certaines familles étaient plus pauvres qu’eux. Des années plus tard, ma grand-mère, qui nous parlait de cette période, nous a avoué qu’elle avait eu à demander du relief à une occasion, en cachette de son mari. Il ne voulait pas qu’elle en demande, il était trop fier. Pour lui, c’était de sa responsabilité de subvenir aux besoins de sa famille.

Il faut dire que le fait d’habiter sur une ferme facilitait la vie des membres de la famille. Ils avaient de quoi manger : du pain, du beurre, des oeufs, des légumes et de la viande. Ils étaient presque autosuffisants. Ils achetaient au magasin général le peu d’ingrédients qui leur manquaient : la farine, le sucre, la graisse, le sel, le poivre, la cassonade et la levure, appelée « galette à cuire », qui servait à faire le pain.

Ils mangeaient les légumes qu’ils cultivaient : pommes de terre, navets, choux de Siam, carottes, choux, betteraves, ognons. L’hiver, ils les entreposaient au frais, dans la cave, dont le plancher était en terre battue, et ils les recouvraient de sable. À part les pommes de terre, ils ne se conservaient pas jusqu’au printemps ; ils ratatinaient. En été, on récoltait aussi de la laitue et des radis. C’est mon grand-père, surtout, qui s’occupait du jardin. Ma grand-mère n’a jamais vraiment aimé cette activité. Plus tard, ma mère en a assumé la responsabilité avec ses frères. Les enfants allaient aussi cueillir des fraises de champs et des framboises sur la ferme. Ma grand-mère préparait des tartes et des confitures.

La viande que la famille mangeait provenait presque exclusivement des animaux qu’elle élevait. Quand mon grand-père et les garçons, lorsqu’ils furent assez grands, tuaient un animal, ils le découpaient en morceaux qu’ils recouvraient de bran de scie. On attendait que la température baisse sous le point de congélation avant de faire l’abattage. Comme il n’y avait pas de réfrigérateur, la viande était conservée dans un caveau rattaché à la cave de la maison. Quand les pots Mason sont apparus des années plus tard, ils servaient à la mise en conserve. Lorsqu’on tuait un cochon, on plaçait les morceaux dans une jarre de grès avec du gros sel et un peu d’eau. Ma grand-mère préparait souvent des grillades de lard salé. Elle faisait d’abord bouillir le lard quelques minutes pour le dessaler, puis elle coupait les morceaux en tranches minces et les faisait griller dans une poêle. Elle en ajoutait de temps à autre dans les omelettes. Elle conservait le gras de cette cuisson pour faire cuire d’autres aliments.

Du poulet se retrouvait également régulièrement sur la table. Avec les restes de viande cuite, ma grand-mère concoctait des hachis, au boeuf, au poulet ou au porc, qu’elle accompagnait, l’été, d’une salade du jardin et de crème. Les enfants se régalaient.

À l’occasion, de l’orignal était au menu. Mon grand-père n’était pas chasseur ; il arrivait toutefois que des orignaux restent pris dans la clôture qui séparait la ferme de mes grands-parents de celle des voisins. Les orignaux qui migraient vers le sud à l’automne et vers le nord au printemps s’y prenaient les pattes de devant en voulant sauter par-dessus. Mon grand-père n’avait pas à se déplacer bien loin pour les abattre. Il en a même tué un du coin de la galerie de la maison ! (Les lois concernant la chasse n’étaient pas strictes à l’époque.) On mangeait la viande et en mettait également en conserve.

La Seconde Guerre mondiale (1939-1945) qui a suivi la Grande Dépression apporta aussi son lot de restrictions et de sacrifices même si, heureusement, personne des familles Lecours et Camiré n’ont eu à y participer directement.

Été 1932, durant la Grande Dépression. Un groupe d’hommes affamés déterminés à obtenir de la nourriture marchent sur la rue Front, vers le magasin général West.

Photo gracieuseté de l’Écomusée de Hearst, soumise par Jalo Kurki

Avec 10 garçons dans la maison de mes grands-parents, Stéphanie Pouliot et Arthur Lecours, c’était parfois turbulent. Tante Monique me racontait que ses frères la taquinaient souvent, particulièrement François (qui venait juste avant elle) et Jules (qui venait juste après). Les plus jeunes suivaient leur exemple.

Ils l’agaçaient jusqu’à ce qu’elle se fâche et pleure. Quand elle se sauvait à bicyclette, les garçons la rattrapaient avec le poney. Ils lui enlevaient sa bicyclette et elle devait revenir à la maison à pied.

Dans certains cas, Stéphanie brandissait un balai, feignant de les frapper, mais ils étendaient les bras en croix et disaient : « À l’aide ! On se fait crucifier ! » (Même jeunes, ils avaient un sens d’humour particulier, trait de caractère qu’ils ont conservé toute leur vie.) Ils savaient bien que leur mère ne les toucherait pas, elle avait trop bon cœur. Puis, ils faisaient les fous et la faisaient rire. Par moments, elle les menaçait en disant : « Attendez que je raconte à votre père ce que vous avez fait. » Mais elle ne disait rien.

Arthur avait un caractère prompt et elle ne voulait pas qu’il fasse une crise. Ça arrivait à mon grand-père de perdre patience. Par exemple, il réprimandait ses garçons parce que la grange n’était pas en ordre ou parce qu’ils ne s’étaient pas bien occupés des animaux, ou encore, parce qu’ils n’avaient pas mis la crème au chemin où elle était ramassée par le propriétaire de la beurrerie. Il semblait oublier leur jeune âge et le temps qu’ils consacraient à l’école, à leurs devoirs et aux travaux domestiques. Il explosait facilement, mais se calmait rapidement. Par contre, personne n’osait lui tenir tête. Simone et Monique étaient obéissantes et il n’avait rien à redire. Sans doute qu’il n’aimait pas vraiment les travaux de la ferme, et qu’il préférait sa scierie. En plus, il était souvent fatigué lorsqu’il venait à la maison, ce qui contribuait à son manque de patience. J’aimerais vous faire part d’occasions où les garçons furent grondés. Comme ma mère, Simone, disait : « On en rit aujourd’hui, mais, à ces moments-là, ce n’était pas drôle. » Le poney étalon de la famille avait ce qu’on appelait « des crises d’amour ». Il était attaché, mais réussissait parfois à se libérer tellement il se débattait. Il galopait alors à travers champs jusqu’à Hallébourg (5 milles/8 km) pour aller courtiser des juments. Il causait de temps à autre des dégâts chez des fermiers. Mon grand-père les remboursait tout en maugréant contre ses gars. Puis, un jour, le chien Rex fut mis en cause. Un printemps, dans la nuit d’un vendredi au samedi, il s’était rendu chez l’un des voisins, la famille Bishop, et avait mordu une centaine de poulets qui étaient tous morts. (Ils n’avaient qu’une morsure légère, donc étaient très peu abimés.)

M. Bishop était furieux ; mon grand-père aussi. Il avait blâmé ses gars de ne pas avoir surveillé adéquatement le chien. Jules avait environ 10 ans, Charles 9, Léon 7. (Benoit et Laurent étaient trop jeunes pour être accusés ; les plus vieux travaillaient à Calstock avec mon grandpère.) M. Bishop était arrivé chez mes grands-parents avec les poulets et avait réclamé une compensation. Mon grand-père avait payé la somme demandée, avait déposé les poulets au frais dans la grange, puis les avait mis en vente à bon prix. Sans doute en avait-il parlé sur le perron de l’église le dimanche matin, car les gens avaient été nombreux à se présenter pour acheter des poulets. Tout d’un coup, mon grand-père était devenu populaire ! Même le Dr Chalykoff était venu. Ça avait flatté mon grand-père. Sa colère s’était dissipée. Le plus cocasse, c’est que le journal local anglophone avait raconté cet incident, écrivant toutefois que le chien des Lecours avait détruit le poulailler et tué les poulets de monseigneur, croyant que Bishop se référait à l’évêque. On avait trouvé étrange qu’un homme d’Église élève des poules… En lisant cet article, toute la famille avait bien ri, y compris mon grand-père. En d’autres occasions, Arthur pouvait se montrer gentil et indulgent envers ses garçons. Par exemple, il avait initié François à la trappe et ce dernier avait enseigné les rudiments aux plus jeunes. Ils trappaient, sur la ferme, divers animaux, dont les rats musqués et les renards pour leur fourrure. Les renards étaient considérés comme des animaux nuisibles puisqu’ils attaquaient les poules.

Au début, ils trappaient avec des cages ; plus tard, ils ont utilisé des collets. Un jour, mon grand-père avait attrapé un renard argenté que les enfants avaient trouvé très beau. Il avait aussi piégé deux renards roux, un mâle et une femelle, et il les avait gardés dans une grande cage pendant quelques mois, espérant qu’ils aient des petits. Ce fut sans succès. Il fallait posséder beaucoup de savoir-faire pour trapper des renards : ils sont futés et difficiles à traquer. Ce n’est pas pour rien qu’on dit « rusé comme un renard ».

La Compagnie de la Baie d’Hudson, qui était installée à Montréal, n’avait pas d’acheteurs sur la route à ce moment-là, mais il y avait des petits acheteurs de fourrures un peu partout : à Hearst, à Mattice, à Fauquier. Léon disait qu’il recevait en moyenne de deux à trois dollars la peau. Une fois, il avait obtenu 95 $ pour un petit renard, ce qui était considérable à l’époque. « S’il n’avait pas eu de poils rouges dans les oreilles, on m’en aurait donné 100 $, disait-il. C’était un truc de bandits ! » Il était bien fier de sa capture.

Aujourd’hui, disait-il, ce même renard vaudrait de 25 $ à 30 $, tellement les prix ont dégringolé. Les revenus que Léon avait remportés de la trappe lui avaient permis de s’acheter une bicyclette pour 35 $. Léon a toujours entretenu un intérêt pour la trappe et il en a fait jusqu’à l’âge de 70 ans. Il capturait surtout des castors, des visons et des martres. Il a même élevé des visons pendant quelques années sur une ferme qu’il avait achetée non loin de celle de son enfance. À la retraite, il a également acquis une expertise dans la fabrication de raquettes de bois. Il s’était rendu dans une communauté crie de la baie James pour y apprendre la technique. Il faisait tout lui-même, à partir de zéro. Il disait en souriant que ce travail représentait « du sang, de la boue et de la bière ».

Jules, Benoit, Léon, Laurent, Charles et Rex, le chien.

Quand ma mère, Simone, était jeune – et même bien avant –, les femmes donnaient naissance à la maison. Elle-même est née sur la ferme de ses parents, Arthur Lecours et Stéphanie Pouliot, à Sainte-Justine, au Québec. Ce fut également le cas de quatre de ses frères : Adrien, Maurice, Clément et Paul. Sept autres enfants ont vu le jour à Hearst entre 1928 et 1938 : François, Monique Jules, Charles, Léon, Benoit et Laurent. Dix garçons et deux filles ! Seul le benjamin est né à l’hôpital et pendant le jour contrairement aux autres. (Mon frère François et moi sommes nés sur la ferme de nos grands-parents.)

Ma mère avait neuf ans lorsque Monique est née en 1930. Elle était tellement contente d’avoir enfin une petite soeur ! Elle croyait alors que sa mère faisait exprès pour choisir des garçons. Aussi, quand Léon, le huitième garçon, est arrivé en 1935, elle a boudé sa mère. Monique qui avait alors cinq ans et Simone qui avait presque 14 ans auraient bien aimé avoir une autre soeur. Simone s’était aperçue que sa mère était enceinte pendant les derniers mois de sa grossesse, mais on n’en parlait pas ; c’était un sujet tabou. (L’éducation sexuelle à l’époque était plutôt restreinte.)

À la vue d’un autre petit frère, Simone s’était mise à pleurer et n’avait pas voulu le regarder. Elle était frustrée, même fâchée, et en voulait à sa mère. Pourquoi préférait-elle les garçons à ce point ? Celle-ci lui disait : « Regarde comme il est beau. » À la fin du troisième jour, Simone a pris son courage à deux mains et a demandé à sa mère pourquoi elle avait encore choisi un garçon plutôt qu’une fille. « On ne choisit pas ce que le Bon Dieu nous amène ; c’est Lui qui décide, on n’y peut rien », lui a-t-elle répondu. Simone a alors commencé à comprendre les « caprices » de la Nature. Elle préférait cette explication à celle qui prétendait que c’était les sauvages (terme employé à l’époque) qui apportaient les bébés. Lorsque la femme se plaignait ou criait pendant ses douleurs, on disait qu’un sauvage était en train de la battre. Lorsque l’enfant naissait, le sauvage partait… Certaines légendes prétendaient aussi que c’était une cigogne qui livrait les bébés ou, encore, qu’ils naissaient dans des choux… Après l’explication de sa mère, Simone a regardé le nouveau bébé et l’a trouvé beau. Elle l’a aimé et en a pris soin comme elle le faisait pour tous les autres.

Lors d’un accouchement, qui se produisait souvent la nuit, mon grand-père – qui était habituellement à la maison à cette occasion –, amenait les enfants chez les voisins, Aldophe et Marie Provençal. On préférait que les enfants ne soient pas présents pour ne pas les effrayer en cas de complications. C’était la coutume à l’époque. Ils passaient donc la nuit chez les voisins et, à l’inverse, les enfants Provençal traversaient chez les Lecours lors d’un accouchement chez eux. Les plus jeunes restaient dormir à la maison, puisqu’ils n’avaient pas connaissance de ce qui se passait.

Mon grand-père allait également chercher le médecin au village. Lorsque François est né (le premier des enfants à voir le jour à Hearst), le médecin était anglophone. Et ma grand-mère ne parlait pas anglais ! Souvent, lors de ses accouchements, elle rencontrait le médecin pour la première fois. Elle n’allait pas le consulter pendant sa grossesse, car, disait-elle : « Je n’étais pas malade. »

Madame Antoinette Villeneuve, qui était infirmière et sage-femme, avait assisté le médecin à quelques reprises, notamment pour la naissance de Charles. Elle et son mari, Noël, habitaient non loin de mes grands- parents et les deux familles étaient amies. À d’autres occasions, c’est madame Provençal qui prêtait main-forte, et ma grand-mère lui rendait la pareille.

Il faut dire aussi qu’il n’y avait pas encore de régime public universel de santé au Canada à ce moment. Ce n’est qu’en 1957 que le gouvernement fédéral a adopté une loi aux termes de laquelle il offrait de partager des couts assumés par les provinces et les territoires pour des services hospitaliers et diagnostiques particuliers. En 1966, la Loi sur les soins médicaux a élargi l’assurance maladie pour englober les services des médecins. Avant la mise sur pied du programme national d’assurance maladie, certaines compagnies privées, comme la Croix Bleue, offraient des assurances individuelles ou collectives, mais mes grands-parents, comme bien d’autres familles, n’avaient pas les ressources financières pour y adhérer. Nombreux étaient ceux qui n’avaient pas les moyens d’acquitter les factures des médecins.

En 1928, mes grands-parents – comme toutes les familles francophones de Hearst et des environs – ont été très heureux d’accueillir un médecin francophone, car, jusque-là, tous ceux qui l’avaient précédé étaient anglophones. Le Dr Louis Aubin a été le médecin de la famille de mes grands-parents pendant de nombreuses années. C’est lui qui a accouché Monique et presque tous les garçons après elle. Fait cocasse : Monique est devenue sa belle-fille en 1954 lorsqu’elle a épousé Alphonse.

L’intimidation à l’école, ça ne date pas d’aujourd’hui ! François, le frère de ma mère, Simone Lecours Camiré, en a été victime il y a plus de 80 ans !

Vers l’âge de 12 ans, en 1940, François a commencé à perdre ses cheveux et, à 14 ou 15 ans, il était complètement chauve. Ses cheveux tombaient par plaques qui s’agrandissaient. Au début, ils repoussaient, puis la pousse a cessé. Il a également perdu ses sourcils et ses cils. Le Dr Aubin, que mes grands-parents ont consulté, disait qu’il avait la pelade, une maladie inflammatoire chronique. Les scientifiques ne savent pas ce qui peut être la cause de cette maladie ; elle peut être due aux facteurs suivants : une infection virale, l’hérédité — chez 20 % à 40 % des cas —, le stress, l’exposition à un produit chimique. François est le seul de la famille qui en a souffert. Le Dr Aubin lui avait dit : « Tu vas te faire appeler quatre poils. » On ne sait pas s’il voulait faire une farce, mais aucun membre de la famille n’avait ri de ce commentaire, qu’on avait considéré plutôt déplacé. François avait été très blessé par cette remarque, surtout que les élèves n’ont pas tardé à l’agacer en utilisant ce sobriquet. Ma grand-mère avait essayé divers produits qui devaient prétendument aider à la repousse, mais sans succès.

Même s’il réussissait très bien à l’école — il était doué, particulièrement en dessin, et aurait pu devenir architecte —, il a abandonné les études après sa 6e année, car les insultes des élèves le blessaient trop. Il n’y avait aucune aide psychologique à cette époque. Mes grands-parents l’ont appuyé dans sa décision et il est resté à la maison pendant deux ans. Il s’occupait des animaux et faisait boucherie ; il a également élevé des lapins et des abeilles. Il ne voulait voir personne. Quand des gens venaient à la maison, il allait se cacher dans la grange ou à l’étable. Il était déprimé et pleurait beaucoup. C’était comme s’il croyait que ce qui lui arrivait était de sa faute, que la pelade était une maladie honteuse. Son apparence physique était altérée et il en ressentait énormément de gêne. La famille se rendait compte des combats intérieurs qu’il menait, mais malgré le soutien que chacun tentait de lui prodiguer, il traversait seul cette épreuve. Vers l’âge de 18 ans, il a opté pour une perruque. À l’époque, les perruques n’étant pas comme celles d’aujourd’hui, c’était évident que les cheveux étaient artificiels. Après les deux années passées à la maison, François est parti travailler à Carey Lake avec son père, qui y avait construit son premier moulin trois ans auparavant (en 1939). Parallèlement à son travail, François suivait des cours par correspondance auprès de la compagnie Caterpillar, où A. Lecours and Sons achetait des tracteurs. Il a très bien réussi ses études et a obtenu un diplôme en mécanique. Il a également suivi des cours dans d’autres domaines. Après son décès en 1984, Maman avait trouvé, dans des papiers qui lui avaient appartenu, un certificat datant de 1973 attestant qu’il avait réussi avec une note de 97 % un cours du soir en comptabilité à l’école secondaire de Hearst. François occupait diverses fonctions au sein de l’entreprise de mon grand-père ; il voyait, entre autres choses, à la construction et à l’entretien des chemins dans les chantiers et à la réparation de la machinerie. Il l’a aussi aidé dans la construction du moulin et du planeur à Calstock. (En aout 1943, mon grand-père avait vendu le moulin de Carey Lake, à la suite du décès accidentel de son fils ainé, Adrien, survenu sur les chantiers en mars 1943. Il avait acheté des droits de coupe à Calstock, de la compagnie Arrow Timber, alors propriété américaine, et le mois suivant, il a construit une scierie sur les rives du lac Constance.) François avait également des talents innés pour l’ingénierie. En juillet 1980, il a été embauché comme contremaitre pour la construction de l’aéroport de Hearst. Au fil des ans, François a consulté des spécialistes à Toronto, à Montréal et même à Rochester pour sa calvitie, mais sans résultats. Certains médecins lui ont dit même qu’il perdait son temps et son argent, qu’il n’y avait rien à faire. Des remarques qui ne faisaient rien pour lui remonter le moral ! Alors qu’il était un enfant comme les autres, la maladie et les moqueries l’ont transformé en un adulte gêné et effacé. Il ne s’est jamais marié et avait peu d’amis, malgré le fait qu’il était affable et généreux. Ses deux amis d’enfance, Georges Labelle (dont la famille demeurait non loin de chez lui) et Jean-Louis Chartrand, ont maintenu des liens avec lui tout au cours de sa vie. Gérard Lacasse, qui travaillait avec lui à Calstock, où il était responsable de l’entretien de la chaudière (boiler), était également proche de lui, comme certains de ses frères, surtout Léon, Paul et Maurice. L’une des passions de François était la Bourse — un passetemps solitaire —, ce qui inquiétait grand-maman. Elle ne comprenait pas les rouages et croyait qu’il jouait avec son argent, un peu comme au casino. Elle craignait qu’il perde ce qu’il avait durement gagné. Mais je crois qu’il a fait plus d’argent qu’il en a perdu, car il était bien renseigné et n’agissait pas à la légère

François, âgé d’environ 15 ans, s’apprête à labourer un champ en vue d’y planter des patates.